Évènement du 17 mars 1303 :
Mort du comte Othon IV de Bourgogne, dernier comte de Bourgogne de la famille héréditaire d’Ivrée.
Qui est Othon/Otton ?
Il nait à Ornans, en 1248, il est le fils de la comtesse de Bourgogne Alix de Méranie et de Hugues de Chalon,
seigneur de Salins. Son père décède prématurément en 1267, et son grand-père
le comte Jean de Chalon,
l’année suivante. Son grand-père fut veuf deux fois et se maria trois fois, il laissa à sa mort onze enfants issus de ses trois mariages, qui formèrent trois lignées rivales et qui vont se partager ses
domaines.
Sa mère Alix de Méranie gouverne le comté jusqu’à sa mort en 1279, elle se remaria en 1268, avec le comte Philippe Ier de Savoie, mais aucun enfant ne naquit de cette seconde union.
Otton IV succède à sa mère et devient comte palatin de Bourgogne et hérite des terres de ses parents, ainsi qu’une partie de celles de son grand-père
et père, dont la seigneurie de Salins.
Par son père, il est un descendant direct de la famille comtale héréditaire de Bourgogne, les Ivrée, issu du
comte Guillaume-Otton, il sera le dernier
mâle de sa famille à porter ce titre.
Le début de son gouvernement :
Ses oncles Jean de Chalon, sire de Rochefort, et Jean de Chalon, sire d'Arlay, héritent des autres terres de leur père Jean de Chalon. Le sire de Rochefort hérite des terres au sud du
comté, épouse la comtesse d'Auxerre Alix, petite-fille du duc de Bourgogne Hugues IV ; le sire d'Arlay hérite des terres dans le sud du Jura (Lons, Heute), dans le centre du Jura (Mouthe, Nozeroy) et dans Besançon,
il épouse Marguerite la fille du duc de Bourgogne Hugues IV.
Les rivalités entre le neveu Otton et son oncle Jean de Chalon-Arlay alimentent une période de troubles, et pas seulement des brouilles familiales. Le nouveau comte se jette éperdument
dans l’alliance française, tandis que son jeune oncle se tourne vers l’empire de
Rodolphe Ier d’Habsbourg, qui est également son beau-frère. En effet Jean et Rodolphe ont épousé tous les deux, des filles du duc Hugues IV
de Bourgogne.
De plus le roi des Romains s’appuie fortement sur son beau-frère pour contrôler les terres de l’ex-royaume bourguignon, dès 1276, il lui concède le péage de Jougne, afin de contrôler
le trafic des Alpes et du Jura ; puis en 1288, il lui inféode le fief de Neuchâtel avec ses dépendances, pour contrôler Montbéliard.
Le 5 juillet 1289, Otton IV désigne clairement son adversaire, le roi des Romains, Rodolphe de Habsbourg. Othon s’allie avec le comte Thibaut III de Ferrette. La région entière
s’embrasa, en sus de son frère et du comte de Ferrette, Othon reçut l’appui de Thiébaud III de Faucogney,
abbé de Luxeuil, d’Eudes de Rougemont, archevêque de Besançon, du baron Louis de Vaud, d’Amédée V,
comte de Savoie, et de son oncle le comte Jean Ier de Chalon-Auxerre.
Rodolphe profite du conflit entre l’évêque de Bâle et le comte de Montbéliard Renaud de Bourgogne, frère d’Otton IV, pour ramener à la soumission le comte de Bourgogne. Solidaires
d’Otton IV, les Bisontins qui se sont érigés en Commune en 1277, se trouvèrent aussi engagés dans le conflit contre le roi des Romains et ses alliés. L’armée de Rodolphe forte de vingt-milles hommes se met en marche en
1289, parmi ses alliés, il y avait bien entendu Jean de Chalon-Arlay, et les 2 frères Jean Ier et Gauthier II de Montfaucon.
Après la prise de Montbéliard, les troupes impériales, se présentent devant Besançon, où se sont réfugiés Otton et Renaud. Rodolphe ne peut s’emparer de la cité, il fait dévaster les
abords notamment les vignes de la rive droite, tandis que Jean Ier de Chalon-Arlay, son allié, bloque les murs. Faute de soutien venu de France, Otton IV ne peut résister longtemps.
Le 3 septembre 1289, Jean de Chalon-Arlay, représentant Rodolphe de Habsbourg qui déjà avait quitté la région, fit promettre au comte de Bourgogne de prêter hommage au roi des Romains
avant le 13 septembre suivant, sous peine d’une amende de 15 000 marcs d’argent. Le comte s’y était jusque-là refusé. Le 20 septembre 1289, Otton IV se soumet à l’empereur, et conseille à la Commune de traiter
avec l’empereur, ce dernier reconnaît aux Bisontins leur commune autonome.
Sa participation aux campagnes d’Aragon :
En 1282, Othon va lutter avec un grand nombre de nobles français aux côtés de Charles d’Anjou comte de Provence et roi de Naples, dans sa lutte contre le roi Pierre III d’Aragon,
pour la conquête du royaume de Sicile. Parmi les princes français, il y a notamment le comte Pierre d’Alençon, frère de Philippe III roi de France et le comte Robert II d’Artois.
En mars 1285, le roi de France Philippe III le Hardi se lance à la conquête du royaume d’Aragon, qui a été donné à Charles de Valois, son fils cadet, par le pape, après l’excommunication
de Pierre III d’Aragon. Le comte de Bourgogne participa à cette campagne aux côtés du duc Robert II de Bourgogne et du comte Jean II de Bretagne. Parmi les seigneurs comtois, Othon était accompagné de son frère
Hugues de Bourgogne, de son oncle le comte d’Auxerre, Jean Ier de Chalon-Auxerre, des seigneurs Aymon IV de Faucogney, Eudes de Fouvent, Gui de Chambornay, et Gui et Guillaume de Joinville.
Otton dut s’endetter lourdement pour cette expédition.
Son alliance avec les Capétiens et prise du pouvoir par Philippe le Bel :
Othon avait épousé en 1263 Philippa de Bar, fille du comte Thibaut II de Bar, dont il eut une fille, Alix, qui sera fiancée à Jean, fils ainé du duc Robert II de Bourgogne, mais Alix et
Jean décèderont vers 1285. Philippa avait quitté ce monde peu de temps avant vers 1283.
Il épouse en deuxième noce Mahaut d’Artois en 1285, une jeune princesse de trente ans sa cadette, fille du comte d'Artois Robert II, petite-nièce du roi Saint-Louis. Entre juin et septembre
1286, Mahaut fut présentée à ses sujets de Bourgogne et on la voit notamment à Dole et Poligny.
C’est au cours des préparatifs, de ces campagnes militaires aragonaises, que l’union d’Otton IV et de Mahaut d’Artois fut négociée. La jeune épouse reçut, outre la part qui lui revenait
dans ses biens maternels, une dot de 10 000 livres tournoises que son frère Philippe et son père Robert devraient remettre au Temple à Paris. Otton de Bourgogne, de son côté, constitua à sa jeune épouse un douaire
centré autour de Salins, Ornans, Arbois et Dole et consistant en la moitié des revenus de son comté de Bourgogne.
Ce mariage participe à la stratégie des rois de France, qui veulent étendre leur influence sur les territoires en périphérie du royaume. L’union, d’Othon avec Mahaut entraîne le
basculement du comté de Bourgogne dans l’aire d’influence française. D’autant que Philippe le Bel ne cache pas ses ambitions de prendre les terres de l’ancien royaume de Bourgogne.
Lors du conflit avec le roi des Romains, le comte multiplie les donations en faveur de son épouse Mahaut d’Artois. En 1290, il lui octroie, ainsi qu’aux enfants qu’elle aurait de lui,
tous ses fiefs dans son comté de Bourgogne. Il révise les clauses de son douaire, lui assignant les terres d’Arbois, Montigny, et Pupillin, et le fief de Blamont et du Châtelet. Pendant cette même période, il oblige ses
vassaux à lui prêter hommage, ce fut le cas pour Jean Ier de Montbéliard, seigneur de Montfaucon, d’Othenin de Ray, seigneur de Ray, d’Étienne II d’Oiselay, baron d’Oiselay, de Jean Ier de Vergy, seigneur de Fouvent
et sénéchal de Bourgogne, d’Aymon IV de Faucogney, seigneur de Faucogney et vicomte de Vesoul, et de Girard d’Arguel. Il donna encore à Mahaut d’Artois le fief de Blamont et du Châtelet.
Le 9 juin 1291 Otton signe un traité secret à Évreux, avec le roi de France Philippe IV le Bel, par lequel il s’engage à marier sa fille Jeanne, qui vient de naître, avec en dot
le comté de Bourgogne, à Philippe le deuxième fils du roi. Par cet acte, Otton supprime à ses enfants à naître l’héritage du comté.
L’historiographie traditionnelle a jugé sévèrement cet évènement et, pour tenter de l’expliquer, insista sur l’incompétence politique du comte et son amour démesuré pour l’argent. Mais il
convient d’être plus prudent, Othon a passé cet accord avec l’assentiment de son épouse mais aussi de sa famille. Et puis l’héritage de son grand-père à morceler ses droits sur le comté de Bourgogne, il est endetté et
à besoin de moyens financiers pour gouverner. Son pouvoir est purement nominal.
De plus la mort du roi des Romains Rodolphe de Habsbourg le délivre de son hommage, d’autant que la succession à l’empire est difficile entre Albert, fils de Rodolphe, et Adolphe de
Nassau, candidat de certains électeurs.
Enfin à titre familial, il vient de perdre successivement sa première épouse Philippa de Bar et leur fille Alix, et le premier enfant de sa seconde épouse est une fille, Jeanne, et lui
a bientôt 40 ans.
Mais coup de théâtre, sans attendre le mariage, de leur enfant, Philippe le Bel se fait céder le comté le 2 mars 1295, lors d’un traité à Vincennes,
en échange d’une somme de 100 000 livres, d'une rente annuelle de 10 000
livres et une rente viagère de 2 000 livres à Othon.
Une grande partie des nobles comtois refusent de rendre hommage au roi et se regroupent autour de Jean de Chalon-Arlay, par un serment prêté le 29 mars 1295, de ne jamais devenir les
vassaux de Philippe IV et d’appuyer par les armes leur refus d’hommage. S’engagèrent en ce sens les frères du comte Otton, Jean de Bourgogne et Renaud de Bourgogne, comte de Montbéliard, ses oncles Jean de Chalon-Auxerre
et Jean de Chalon-Arlay, Thiébaud de Faucogney, abbé de Luxeuil, Aymon II de Villersexel, seigneur de Villersexel, Henri II de Joux, seigneur de Joux, Jean II de Joux, seigneur de Liévremont, Othenin de Ray,
seigneur de Ray, Aymé de Ray, fils du précédent, mais aussi Gautier de Montfaucon, seigneur de Vuillafans, Simon de Montbéliard, seigneur de Montrond, Thiébaud, seigneur de Neuchâtel, Jean de Neuchâtel,
connétable du comté, Girard, seigneur d’Arguel, Pierre de Joinville, seigneur de Marnay, Guillaume, seigneur de Corcondray, Hugues d’Annegray, Jean de la Chassagne, Jean de Vaites, Étienne II d’Oiselay, et
Guillaume d’Arguel.
Le 2 août 1295, les mêmes coalisés s’allièrent au roi d’Angleterre, Édouard Ier, qui les engagea à mener une guerre complète contre le roi de France. Les coalisés sont financés également
par le roi des Romains, Adolphe de Nassau.
L’année suivante, le pape Boniface VIII, intervint dans le conflit. Cherchant à favoriser les opposants au roi de France, il confirma en 1296 à Jean de Chalon, seigneur d’Arlay, le
privilège de battre monnaie et nomma son frère Hugues de Chalon prince-évêque de Liège.
Après six ans de conflit, et sans réel vainqueur, en 1301, les barons comtois se soumettent à leur nouveau maître, Philippe le Bel. Jean de Chalon-Arlay reçoit en 1302 une pension royale.
Son implication dans les guerres flamandes :
Mahaut donne une seconde fille au comte en 1296, Blanche, elle est destinée à épouser le troisième fils du roi Philippe le Bel, Charles. Othon n’étant plus que comte nominal du comté de
Bourgogne, il se met au service du roi et va combattre dans les Flandres dans les armées royales, il est présent à la bataille de Furnes en aout 1297 sous les ordres de son beau-père le comte Robert II d’Artois, ou les
français gagnent la bataille.
En 1298, le frère de Mahaut, Philippe d’Artois, blessé grièvement à la bataille de Furnes, décède des suites de ses blessures, la succession sur le comté d’Artois, du comte Robert II
va s’engager entre Mahaut, et son neveu Robert III, fils de Philippe.
En 1300, Mahaut met au monde, un garçon prénommé Robert comme son grand-père maternel, car il est écarté de la succession du comté de Bourgogne, suite au traité de Vincennes, il est
destiné à hériter du comté d’Artois.
Mais Robert n'héritera pas du comté, il meurt à l'âge de 17 ans. Son beau-père décède à la bataille de Courtrai en juillet 1302, ou les milices flamandes infligent une sévère défaite à la chevalerie française (bataille dite des Éperons d’Or).
Otton est nommé comte d’Artois du chef de sa femme. Début décembre 1302, il commande une armée royale et remporte une bataille près de Cassel contre les milices flamandes. Vers la fin décembre 1302, une armée sous la
conduite d’Othon de Bourgogne, de Jacques de Bayonne et de Miles X de Noyers sortirent de Saint-Omer pour attaquer l’église de Buysscheure où les Flamands s’étaient retranchés mais ils ne purent s’en emparer.
Ils apprirent qu’un corps de troupes flamandes se dirigeait de Watten vers Cassel. Ils se rangèrent aussitôt en ordre de bataille et attendirent les Flamands. Le combat fut long et sanglant et les Flamands furent
poursuivis jusqu’à Watten dont le monastère fortifié tomba aux mains des Français. Deux mille Flamands succombèrent mais le comte de Bourgogne fut blessé sévèrement.
Otton est ramené à Melun ou il meurt le 17 mars 1303 des suites de ses graves blessures.
La politique de Philippe le Bel ne change pas, il affirme sa volonté de continuer à gouverner la province.
Mahaut fera ensevelir avec faste le corps de son mari dans l’abbaye de Cherlieu, en 1310, dans une chapelle située derrière le chœur, à côté de ses 2 parents qui avaient choisis ce même
lieu.
Sa succession :
Pour Jeanne, la succession à son père ne sera pas évidente, en effet suite à l’accord de 1295, le roi de France, Philippe IV le Bel continue de gouverner le comté.
En 1307,
le mariage entre Jeanne de Bourgogne et Philippe de France, le futur Philippe V le Long, ne change pas la situation, Philippe le Bel gouverne la province. Jeanne porte le
titre nominal de comtesse de Bourgogne.
Ce n’est qu’à la mort en 1314 de Philippe le Bel, suite à une chute de cheval, que Jeanne et Philippe se mettent réellement en possession du comté de Bourgogne.
Ses actes majeurs :
La première Université « studium générale » comtoise fut fondée à Gray par le comte de Bourgogne Otton IV en 1287. En raison des troubles et du manque d'argent, elle n'eut pas d'existence
effective.
Mahaut fondera divers hôpitaux dont celui de Bracon en 1327 pour respecter les dernières volontés de son mari.
Son portrait :
|