Évènement du 11 mai 994 :
Décès au prieuré de Souvigny de l'abbé Mayeul de Cluny, il est le 4ème abbé de la grande abbaye mâconnaise, qu'il dirigea pendant 40 ans.
Son enfance :
Il né à Valensole en Provence, vers 910, son père est un noble qui se nomme Foucher, sa mère s’appelle Raymonde. Celle-ci est une dame de la famille
vicomtale de Narbonne. Cette famille est bien connue dans le Mâconnais, car elle donna naissance à la première famille héréditaire des comtes de Mâcon, mais donna aussi des vicomtes sur la cité.
En 916, des troubles importants sévissent en Provence, lutte contre les Sarrasins et guerres civiles entre les seigneurs locaux. Raymonde, accompagnée de son fils Mayeul, se réfugie dans le Mâconnais,
vers cette période, auprès de son oncle ou de son frère le vicomte de Mâcon Albéric Ier.
Ce dernier ayant quitté sa Narbonne natale, fut installé dans le Mâconnais
par le duc d'Aquitaine Guillaume le Pieux. L’incertitude sur le père de Raymonde
repose sur cette question : est-elle la fille du vicomte Mayeul, père d’Albéric
vicomte de Mâcon, ou du vicomte Mayeul, frère du même Albéric ? Les sources ne sont pas assez précises.
Sa vie religieuse :
Mayeul entre dans le clergé, il va étudier à Lyon au monastère de l’Ile-Barbe, revient à Mâcon et devient chanoine de la cathédrale Saint-Vincent de Mâcon, puis l’évêque Bernon le nomme archidiacre à
21 ans. En 930, on lui propose l’archevêché de Besançon, il refuse.
Son oncle ou grand-oncle Albéric devient comte de Mâcon vers 928/930,
en succédant à son beau-père, le comte Raculf II. Il décède en 942/943, son fils Liétaud associé déjà depuis quelques années
au fonctionnement du comté, lui succède.
C’est au moment au Liétaud dirige seul le
comté de Mâcon, et devient l'avoué de l'abbaye de Cluny, que Mayeul, son
cousin, entre à l'abbaye et on lui confie les fonctions de bibliothécaire et
de maître des cérémonies.
En 948, l’abbé Aymard devenu aveugle, lui laisse diriger le monastère comme coadjuteur, puis Aymard démissionne de sa charge d’abbé en 954,
et désigne Mayeul comme son successeur.
Cette élection est approuvée par son cousin Liétaud, comte de Mâcon et avoué de l’abbaye de Cluny, de Maimbaud, évêque de Mâcon et de l’ensemble des religieux de Cluny.
Sous l’abbatiat de ce personnage charismatique marque le véritable tournant, matériel comme spirituel, dans l’histoire de Cluny, qui est à son arrivée, une petite structure, peu connue de l’extérieur.
Il se lie avec tous les Grands, les rois de Bourgogne, les empereurs Germaniques, les rois des Francs, les ducs de Bourgogne, les comtes de Mâcon et de Chalon, les évêques de Langres, les archevêques de Besançon et de Lyon.
Mayeul étend son rayonnement à l'ensemble de l'Occident, Cluny va devenir avec Rome, le centre du monde chrétien pendant de nombreuses années.
Ses bonnes relations avec les évêques de Mâcon Bernon puis Mainbaud favorisent les donations régionales de ceux-ci
; ils donnent à l’abbaye de nouvelles paroisses qui agrandissent son patrimoine.
Il s’occupe du développement financier de l'abbaye, en gérant avec soin les donations qui affluent. Car si on début, elles sont régionales, peu à peu elles vont venir de partout, la Bourgogne, l’Auvergne, le Bourbonnais, le Nivernais, les vallées de la Saône, de la Loire et du Rhône, l’Italie, la Germanie enrichirent le patrimoine de l'abbaye. Ces donations sont, pour nombre d'entre elles, liées à la disposition nouvelle de la mémoire des morts de la part des seigneurs et nobles.
Ses relations avec la reine impératrice Adélaïde de Bourgogne :
Entre 950/970, nous observons dans les chartes ses très bonnes relations avec
Adélaïde, sœur du roi de Bourgogne
Conrad le Pacifique, et épouse d’abord du
roi d’Italie Lothaire, puis du
roi de Germanie Otton Ier, puis empereur dès 962, qui lui confèrent une certaine influence à la cour du Saint-Empire
romain germanique, mais également à la cour du royaume de Bourgogne. Il intervient aussi dans les querelles privées de la famille impériale.
Quelle relation entre Mayeul et Adélaïde permet une telle connivence ?
Nous proposons la piste suivante : Vers 940/942, le roi Conrad épouse une dame nommée Adélanie/Attala, ce nom fait parti du stock onomastique des comtes de Mâcon, Albéric épousa une dame de ce nom, et ils ont eu une fille qui porta ce nom. L’origine de la famille de la première reine de Bourgogne n’ai donné par aucune charte. Nous pensons très fortement que cette Adélanie est la fille du comte Albéric de Mâcon, cela expliquera cette donation conséquente du roi à ce dernier, autour de Salins, vers 942/943, mais également la montée en puissance de son fils le comte Liétaud de Mâcon, qui sera nommé dans une charte
de 955, comte de Bourgogne !! Et enfin, explique la connivence entre la reine, puis impératrice, Adélaïde avec Mayeul, car celui-ci est le cousin de sa belle-sœur Adélanie.
L'impératrice Adélaïde et l’empereur Otton Ier lui confient la réforme des grands monastères en terre d'Empire, ainsi il intervient à Ravenne, Pavie, Payerne, Parme. A la mort de l’empereur, en mai 973, Mayeul reste l'ami et le conseiller de son fils Otton II puis à la mort de celui-ci, en décembre 983, de son petit-fils Otton III.
L’empereur Otton II lui propose le siège pontifical après la mort de Benoît VI (juin 974) et Benoît VII (juillet 983), siège qu’il refuse, se jugeant plus utile au milieu de ses moines.
En 972, Mayeul séjourne au monastère de Pavie, en Italie, qui dépend de Cluny. Ensuite il assiste au mois d’avril, au mariage de l’empereur Germanique Otton II avec la princesse byzantine Théophanie à Rome.
Lors du voyage retour, il rentre avec des frères et des pèlerins à Cluny, et traverse les Alpes au col du Saint-Bernard. Ils sont attaqués et pris en otage par des Sarrasins. Ceux-ci demandèrent s’ils possèdent des biens et des richesses pour pouvoir se racheter. Mayeul répond qu’il ne possède rien et ne veut pas devenir possesseur de biens, mais il a sous sa domination beaucoup d’hommes propriétaires de vastes domaines. Alors Mayeul envoie un billet à Cluny pour demander la rançon de leur libération, soit la somme de mille livres d’argent. Il faut un mois, à l’abbaye pour réunir cette somme considérable.
Ses interventions en Bourgogne :
Vers 971, le comte
Lambert de Chalon, songe à fonder un édifice religieux, il demande alors conseil à l'abbé de Cluny, Mayeul. Celui-ci lui propose des terres dans le Charolais. Les travaux de construction commencent en 973. Le
monastère de Paray-le-Monial est consacré en 976, en présence de Mayeul. Puis en mai 999, le monastère sera donné à l’abbaye clunisienne.
En 986, l’évêque d’Auxerre, Héribert, et son demi-frère le
duc Eudes-Henri de Bourgogne font appel à l’abbé de Cluny Mayeul, pour restaurer la discipline et le respect des règles de l’abbaye de Saint-Germain d'Auxerre. Mayeul vient en personne pour réaliser ces points et une fois ceux-ci accompli, nomme Heldric comme abbé pour lui succéder sur le lieu.
Lors d’un voyage en Italie en 987, l’abbé Mayeul de Cluny ramène avec lui en Bourgogne, un jeune moine
Guillaume de Volpiano, à l’avenir très prometteur.
L’évêque de Langres,
Brunon de Roucy, est aussi un partisan de la réforme de Cluny, en novembre 989, avec l’appui du duc Eudes-Henri, demande à Mayeul, abbé de Cluny, des moines expérimentés pour régénérer le monastère de
Saint-Bénigne de Dijon, douze moines arrivent dont Guillaume de Volpiano. Ce dernier est le cousin du comte de Mâcon
Guillaume-Otton, et de l’évêque de Langres.
Mayeul, à son instigation, introduit dans toutes les maisons clunisiennes la pratique généralisée des soins aux malades. Son engagement sera poursuivi par ses successeurs, et une grande infirmerie verra le jour à Cluny sous l’abbatiat de
Pierre le Vénérable en 1150.
La construction de Cluny II :
C'est à lui que l'on devra l'achèvement de l'église abbatiale de Cluny II, commencée par l'abbé Aymar vers 948 et dédicacée le 14 Février 981, par l'archevêque de Lyon Burchard II, fils du roi Conrad de Bourgogne.
Cette nouvelle église est destinée à remplacer un premier édifice devenu trop petit.
Le chevet de l’église a été monté en voûtes de pierres. Il est le premier exemple de voûtes à une telle échelle dans un édifice religieux. Il semble que la voûte, outre son rôle recherché contre l’incendie y joue un rôle par son effet de résonance. Les moines veulent alors donner au monastère une image d’unité et d’harmonie. L’église de Cluny II, de 75 mètres de long, fut construite en moellons.
À la croisée du transept (étroit) et du vaisseau central (large), s'élève un haut clocher, cette disposition du clocher au-dessus de la croisée devient la règle quasiment absolue pour toutes les églises romanes de la région.
Les travaux récents d’archéologie ont permis de trouver sous Cluny II (murs de 80 cm d’épaisseur) des traces de l’ancienne demeure carolingienne (murs de 50 cm d’épaisseur) fondé par le
comte Guérin ou Warin de Mâcon, en 825, avec sa chapelle comme en atteste la découverte d’une pièce de monnaie à l’effigie de
Charles le Chauve du milieu du IXème siècle.
Sa succession :
C’est la charte de Cluny n° 1957, datée après le 19 octobre 993 (date du décès du roi Conrad de Bourgogne) et certainement avant mai 994, qui concerne la succession à la tête de l’abbaye de Cluny, l’abbé Mayeul désigne Odilon comme son successeur. Cette charte est singulière, car la liste des présents est la suivante : le
roi Rodolphe III de Bourgogne, l’archevêque Burchard II de Lyon, demi-frère du roi, l’évêque Hugues de Genève, l’évêque Henri de Lausanne, l’évêque Hugues de Sion, les comtes Lambert, Burchard et Adalbert sont des comtes du royaume bourguignon. Mais nous ne voyons pas la présence du duc Eudes-Henri de Bourgogne, avoué de l’abbaye, et du comte Guillaume de Mâcon, seigneur de la contrée
!! Le roi Hugues Capet lui demande de venir réformer Saint-Denis, Mayeul prend la route mais
décède le 11 mai 994, au prieuré de Souvigny où il est enterré.
Le destin de Mayeul est exceptionnel. Il fut spontanément reconnu comme saint après sa mort.
Sa statue au prieuré de Souvigny :
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